A l'occasion de l'après-midi de réflexion "CPAS et associations, duos ou duaux" organisé par Fédération des CPAS de Wallonie le 2 juin dernier aux Moulins de Beez, j'ai lancé un appel au dialogue et à la recherche de convergences avec le réseau associatif. En voici le texte:
Mesdames
et Messieurs,
Chers
Collègues,
Chers
partenaires,
En
nous adressant une carte blanche il y a quelques jours, Jean Blairon
et Christine Mahy ont relancé un indispensable dialogue entre le
secteur associatif et les CPAS sur la question de leurs rôles
respectifs dans la vie de l'Action sociale, au sens large.
Ce
débat constitue avant tout une nécessité absolue si l'on veut
améliorer la qualité-même de cette Action sociale au profit des
citoyens.
La
définition des rôles de chaque partenaires dans cet important
travail peut, et à mon sens doit, être remise en débat.
Qui
fait quoi, comment, avec qui, qui est le plus efficace ou le plus
pertinent dans tel ou tel domaine, ... ? Sont autant de
questions que les CPAS et le secteur associatifs se poseront dans les
mois à venir dans des cercles de débat aux tailles variées avec un
souhait : que chaque participant puisse exprimer ses avis en
toute liberté et que tous les avis soient pris en considération de
manière égalitaire.
Après,
il restera des désaccords, c'est un fait évident. La
structuration-même de l'Action sociale publique actuelle est
génératrice de désaccords entre CPAS et associations.
Moi-même,
je suis, par exemple, partisan de l'idée qu'une part de la
responsabilité finale de ce travail doit revenir au secteur public
puisqu'il est l'émanation des votes des citoyens et qu'il peut
assurer une certaine stabilité au travail de construction
collective. Mais d'autres ne seront pas d'accord avec cet avis. Et
c'est bien ainsi.
Mais
ces désaccords auront au minimum l'occasion d'être reconnus et mis
en mots par les deux grands partenaires. Nous devons, à mon sens,
créer de nouveaux lieux de dialogue entre réseau associatif et
CPAS, entre citoyens et CPAS.
Nos
deux secteurs jouent tous deux un rôle d'intermédiaire entre les
citoyens et la société. Il s'agit là d'un rôle majeur que de
rapprocher le citoyen de l'Etat, de la chose publique, de la vie en
collectivité, etc. Cela place l'Action sociale au cœur du parcours
de vie de toutes et tous les citoyens. Car l'Action sociale est
l'affaire de tous, pas seulement des plus faibles. Tout le monde sera
concerné un jour ou l'autre par l'Action sociale. Ce travaille
mérite donc qu'on lui consacre le maximum d'énergie.
Or,
combien d'énergie est-elle perdue dans des conflits stériles entre
travailleurs sociaux de l'associatif et des CPAS ? Non seulement
ces conflits sont d'un autre temps, mais en plus, ils ne reposent
plus sur aucune base suffisamment solide pour l'emporter sur la
nécessité de nous allier autour d'un socle de valeurs essentielles
et communes pour faire face à un système générateur d'inégalités.
Il
nous faut donc sortir des conflits issus d'un autre âge. Il nous
faut arrêter le temps, comme nous le faisons à l'instant pour
inventer ensemble un nouveau modèle d'Action sociale qui :
place celle-ci dans le parcours de
vie de tous les citoyens et en cela ça nous concerne tous,
dépasse les clivages philosophiques
et politiques
et qui ainsi puisse permettre la
mobilisation nécessaire à la lutte contre ce tout ce qui renforce
les inégalités.
Comme
Christine Mahy et Jean Blairon le proposent, les CPAS doivent s'unir
aux associations, mais aussi au citoyens, aux experts et aux
représentants des citoyens pour critiquer, dans le sens le plus
noble du terme, les processus structurels qui sous-tendent le
renforcement de la pauvreté, sous peine de participer nous-même, en
tant que témoins, à son développement.
Je
profite de cet instant pour vous informer que, dans quelques jours,
sera lancée une action de large mobilisation de toutes celles et
ceux qui veulent défendre notre Action sociale menacée par de trop
nombreux dangers. Je ne manquerai pas de revenir avec vous le jour
venu.
Je
vais vous faire une proposition :
L'une
de nos premières actions communes pourraient être centrées autour
du respect du secret professionnel. Il s'agit là d'une notion qui a
du sens et que partagent tous les travailleurs sociaux.
Le
saviez-vous ? : La Fédération ses CPAS de Wallonie est
très critique à l'égard de l'idée du SPP IS de créer un dossier
individuel partagé qui suivrait un citoyen ayant demandé l'aide
d'un CPAS toute sa vie. Quel est l'intérêt qu'une trace d'une
situation de pauvreté antérieure suive
ad vitam
un individu alors que toute nouvelle demande d'aide nécessite, de
toute façons, une nouvelle enquête sociale actualisée ?
Aucun !
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François
Hollande disait mercredi dernier dans un discours à la nation
française que l'indifférence était l'ennemi contemporain.
L'indifférence face aux inégalités, aux injustices, aux indécences
tue parce qu'elle fait de nous des témoins et non des opposants de
l'inégalité.
Les
événements récents ont eu le mérite d'accélérer ce nécessaire
dialogue entre associations et CPAS. Je m'en réjouis parce qu'il va
renforcer notre rôle d'acteurs de changement.
Ensemble,
défendons les droits de protection de tous les citoyens, tels qu'ils
ont été obtenus par celles et ceux qui nous ont précédés.
Et
ensemble, analysons les processus structurels qui renforcent, voire
aggravent les inégalités.
Ensemble,
cherchons nos complémentarités, ne nous arrêtons pas à des
conflits stériles, cherchons à nous comprendre dans la diversité
de nos points de vue.
Sinon,
il risque d'être trop tard.
Claude EMONTS,
Président.