Les réponses données par les responsables politiques à la crise sont-elles bonnes? En tout cas elles provoquent un rejet, une incompréhension de plus en plus répandus, nous dit Claude Emonts, président de CPAS. Et comme citoyen mais aussi comme homme politique engagé, cela l'inquiète.
Chaque matin, lorsque j’écoute les informations et que j’entends ce que j’entends, je me demande si je suis toujours bien dans le monde que j’ai connu, moi qui suis né en 1947, dans la joie et l’insouciance de la paix revenue.
Le rêve brisé
Du nord au sud de l’Europe, ce grand rêve que je partage avec (encore ?) beaucoup de ceux qui ont mon âge - entre autres – se réveille sous la menace de cette maladie du corps social qu’est la droite extrême.
Quand je me rappelle la phrase terrible de Mussolini et des fascistes italiens : " Seule la guerre est hygiénique " et que je vois aujourd’hui une aube dorée se lever en Grèce sur fond de svastika, je suis inquiet.
Moi qui suis un internationaliste convaincu, quand je vois se fissurer partout la confiance en la démocratie, je suis inquiet. Car elle se fissure là-bas et ici, en bas et en haut de l’échelle sociale.
Inquiet d’entendre tous ces citoyens sans mémoire, ou qui semblent avoir été privés de cours d’histoire, considérer le vote extrême comme " justifiable " … faute d’autres solutions. Et je me pose des questions. Des questions sur notre civilisation et son soit-disant degré de développement, mais des questions aussi sur notre rôle à nous, hommes et femmes politiques. Car il ne faut pas regarder si loin pour trouver de quoi s’inquiéter…
Que faisons-nous si mal pour que le résultat de notre action débouche en bout de course sur un rejet de plus en plus généralisé du système politique pour lequel tant de nos aînés ont donné leur jeunesse et qui pourtant fait de nos pays ceux du monde où il fait bon vivre…
Prenons un exemple très simple dans le domaine qui est le mien et que beaucoup d’entre nous pourront extrapoler à leur situation à eux…
Président d’un grand CPAS, il m’est donné de rencontrer beaucoup de personnes différentes et notamment des travailleurs de l’institution que je préside.
Les Grecs et nous
Et quand je vois la fatigue des équipes, confrontées à la pauvreté et son cortège de désespoirs, le manque de confiance dont beaucoup d’intégrants de celles-ci font preuve par rapport à leurs responsables politique, je me demande : " Que faisons-nous si mal " et je suis inquiet.
Inquiet en me disant que les mêmes comportements produisant les mêmes conséquences et en les remettant à leur échelle, ce que l’on impose aux Grecs pouvant d’une certaine manière se comparer aux traitements que l’on inflige à certains services sociaux, l’incompréhension et le rejet ne peuvent que suivre…
Suis-je dans l’excès quand je dis que d’une certaine manière et à l’échelle, les choses peuvent se comparer ? Je ne pense pas, car sur le terrain des grands centres urbains, mais pas seulement, la pauvreté ne cesse de croître et la gravité des cas individuels suit une courbe elle-aussi exponentielle. Or et voilà le fondement de mon inquiétude : la réponse n’est pas à la hauteur des défis. Certains nous méprisent et nous affublent de noms d’oiseaux (" pofitariat "), d’autres regardent ailleurs ou feignent de croire que la responsabilité de la pauvreté revient à ceux qui luttent contre elle ou aux pauvres eux-mêmes (car quand on veut, on peut, n’est-il pas ?)… Et nous répondent au désespoir par des plans de gestion drastiques, par une orthodoxie budgétaire qui ne tient compte de rien d’autre que des chiffres, ceux auxquels les gens de terrain ne comprennent rien, car ils ne correspondent à rien de ce qui se vit… Et alors que ce qui est vécu et ressenti, c’est l’étouffement devant la situation, qui continue à plonger…
Nier ou ne pas voir la réalité
Oui, vraiment je suis inquiet… Car à cette réalité de terrain, qu’elle soit au plan international ou au plan très local, très " intime " dirai-je, nous opposons un langage qui n’est plus compris, un message qui ne porte plus… quelle que puisse être notre sincérité…
Or, pas plus que l’on ne peut étrangler les Grecs, on ne peut par son regard détourné, nier la dégradation de la situation sur le terrain de la (grande) précarité. Pas plus que l’austérité n’est une réponse à tout, le serrage de ceinture des services sociaux n’est suffisante…
C’est Reggiani qui parlait des " loups ", ceux qui sont entrés dans Paris un jour par Clichy. Attention que par notre aveuglement collectif, nous ne soyons ceux qui, bien involontairement, les nourrissent…
De quoi être inquiet, non ?
Le rêve brisé
Du nord au sud de l’Europe, ce grand rêve que je partage avec (encore ?) beaucoup de ceux qui ont mon âge - entre autres – se réveille sous la menace de cette maladie du corps social qu’est la droite extrême.
Quand je me rappelle la phrase terrible de Mussolini et des fascistes italiens : " Seule la guerre est hygiénique " et que je vois aujourd’hui une aube dorée se lever en Grèce sur fond de svastika, je suis inquiet.
Moi qui suis un internationaliste convaincu, quand je vois se fissurer partout la confiance en la démocratie, je suis inquiet. Car elle se fissure là-bas et ici, en bas et en haut de l’échelle sociale.
Inquiet d’entendre tous ces citoyens sans mémoire, ou qui semblent avoir été privés de cours d’histoire, considérer le vote extrême comme " justifiable " … faute d’autres solutions. Et je me pose des questions. Des questions sur notre civilisation et son soit-disant degré de développement, mais des questions aussi sur notre rôle à nous, hommes et femmes politiques. Car il ne faut pas regarder si loin pour trouver de quoi s’inquiéter…
Que faisons-nous si mal pour que le résultat de notre action débouche en bout de course sur un rejet de plus en plus généralisé du système politique pour lequel tant de nos aînés ont donné leur jeunesse et qui pourtant fait de nos pays ceux du monde où il fait bon vivre…
Prenons un exemple très simple dans le domaine qui est le mien et que beaucoup d’entre nous pourront extrapoler à leur situation à eux…
Président d’un grand CPAS, il m’est donné de rencontrer beaucoup de personnes différentes et notamment des travailleurs de l’institution que je préside.
Les Grecs et nous
Et quand je vois la fatigue des équipes, confrontées à la pauvreté et son cortège de désespoirs, le manque de confiance dont beaucoup d’intégrants de celles-ci font preuve par rapport à leurs responsables politique, je me demande : " Que faisons-nous si mal " et je suis inquiet.
Inquiet en me disant que les mêmes comportements produisant les mêmes conséquences et en les remettant à leur échelle, ce que l’on impose aux Grecs pouvant d’une certaine manière se comparer aux traitements que l’on inflige à certains services sociaux, l’incompréhension et le rejet ne peuvent que suivre…
Suis-je dans l’excès quand je dis que d’une certaine manière et à l’échelle, les choses peuvent se comparer ? Je ne pense pas, car sur le terrain des grands centres urbains, mais pas seulement, la pauvreté ne cesse de croître et la gravité des cas individuels suit une courbe elle-aussi exponentielle. Or et voilà le fondement de mon inquiétude : la réponse n’est pas à la hauteur des défis. Certains nous méprisent et nous affublent de noms d’oiseaux (" pofitariat "), d’autres regardent ailleurs ou feignent de croire que la responsabilité de la pauvreté revient à ceux qui luttent contre elle ou aux pauvres eux-mêmes (car quand on veut, on peut, n’est-il pas ?)… Et nous répondent au désespoir par des plans de gestion drastiques, par une orthodoxie budgétaire qui ne tient compte de rien d’autre que des chiffres, ceux auxquels les gens de terrain ne comprennent rien, car ils ne correspondent à rien de ce qui se vit… Et alors que ce qui est vécu et ressenti, c’est l’étouffement devant la situation, qui continue à plonger…
Nier ou ne pas voir la réalité
Oui, vraiment je suis inquiet… Car à cette réalité de terrain, qu’elle soit au plan international ou au plan très local, très " intime " dirai-je, nous opposons un langage qui n’est plus compris, un message qui ne porte plus… quelle que puisse être notre sincérité…
Or, pas plus que l’on ne peut étrangler les Grecs, on ne peut par son regard détourné, nier la dégradation de la situation sur le terrain de la (grande) précarité. Pas plus que l’austérité n’est une réponse à tout, le serrage de ceinture des services sociaux n’est suffisante…
C’est Reggiani qui parlait des " loups ", ceux qui sont entrés dans Paris un jour par Clichy. Attention que par notre aveuglement collectif, nous ne soyons ceux qui, bien involontairement, les nourrissent…
De quoi être inquiet, non ?
http://www.lalibre.be/debats/opinions/article/742557/parcours-d-insertion.html
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